Aventure de falaises en Haute Normandie
Un peu de géologie...
La Haute-Normandie, sur un plan géologique, appartient entièrement au Bassin
parisien. Encadré par des massifs hercyniens (roche primaire), il a été
recouvert par la mer durant des centaines de millions d'années, de l'ère
secondaire jusqu'à la fin de l'ère tertiaire (il y a environ deux millions
d'années).
Cette longue présence de la mer, le flux et le reflux
des eaux selon les périodes, expliquent le sous-sol sédimentaire de la
Haute-Normandie formé, sur sa plus grande surface, de couches calcaires pouvant
dépasser plusieurs centaines de mètres, elles-mêmes recouvertes de formations
superficielles d'épaisseur variable d'argile et de limon. La couche calcaire,
plus ou moins riche en fossiles, est principalement constituée, sauf dans le sud
de l'Eure et dans le Vexin normand (tertiaires), d'épaisses couches de craie du
crétacé supérieur (fin de l'ère secondaire) comportant des bancs de silex gris
ou noir.
Cette couche calcaire, qui varie de la craie la plus
tendre à la roche calcaire la plus dure telle la pierre de Vernon, est
généralement recouverte d'une couche d'argile à silex qui peut atteindre 10
mètres. Cette argile a été formée durant les périodes chaudes de l'ère tertiaire
(climat tropical) par l'érosion de la craie à l'air libre. Elle confère au sol
une certaine imperméabilité. Elle est, quand elle affleure, assez peu fertile,
mais elle fixe bien les massifs forestiers.
L'argile à silex est elle-même recouverte, sur les parties planes en
particulier, d'un manteau de limon pouvant atteindre quelques mètres. Ce limon,
très fertile, est composé de matériaux fins apportés par le vent à l'ère
quaternaire (notre ère). Commencée il y a environ deux millions d'années, cette
ère a connu plusieurs périodes de grandes glaciations, à l'origine de cette
couche de limon également appelée loess. Plus près de nous, les rivières, et
plus particulièrement la Seine, ont donné naissance à d'importants dépôts
alluvionnaires, souvent disposés en terrasses recouvertes de forêts (Brotonne,
Roumare, Rouvray, etc.).
La grande muraille
cauchoise.
De l'estuaire de la Seine à celui de la Somme, sur 140 kilomètres, s'étire le
plus bel ensemble de hautes falaises en France. L'arche de la porte d'Aval à
Etretat en est le site le plus célèbre. Les arches sont sans doute le résultat
de la "désobstruction" de conduits karstiques profonds. Les "aiguilles" comme
celles d'Étretat ou du Roc Valdieu pourraient être une partie d'arche effondrée.
Ces falaises, qui dépassent régulièrement 100 mètres, sont taillées dans
d'épaisses couches sédimentaires de craie d'âge crétacé qui constituent
l'ossature du plateau cauchois et que l'on retrouve tout au long de la vallée de
la Seine. Elles sont entrelardées de banc de silex, qui, attaqués par les flots,
sont à l'origine des galets si caractéristiques à la côte cauchoise. Ces galets,
en nombre suffisant, protègent le pied des falaises, mais ce n'est plus le cas
en certains endroits car de forts courants les déplacent vers le nord.
Au dessus des falaises s'étale un épais manteau de
"formation à silex", de couleur rougeâtre, provenant pour l'essentiel de la
dissolution de la craie à l'air libre. Sous l'action de la pluie ce manteau se
répand sur la falaise lui donnant la teinte ocre que nous lui connaissons.
Plusieurs entailles, créées le plus souvent par des
cours d'eau, permettent l'accès à la mer. Ce sont notamment les vallées de la
rivière de Valmont, de la Durdent, de la Veules, du Dun, de la Saâne, de la
Scie, de l'Arques, de l'Yères et de la Bresle, auxquelles s'ajoutent une
quarantaine de valleuses, vallons suspendus au-dessus de la mer, le plus souvent
reliés à l'estran par un escalier.
Constamment attaquée par les marées et surtout par
l'infiltration des eaux de pluie dans les fissures provoquant la dissolution de
craie sur son passage, la falaise cauchoise recule, de plus de 50 cm par an en
certains endroits. Nombre de constructions construites au bord du plateau se
sont déjà écroulées, tel l'ancien phare d'Ailly en 1964. D'autres sont
sérieusement menacées, comme l'église de Varengeville et son célèbre cimetière
marin.
D'après Le
Guide du Pays de Caux, par Pierre Auger et Gérard Granier, édition La
Manufacture,1988, pp 76 à 79.